En 2013, Elodie et Antoine sont partis pour un PVT en Nouvelle-Zélande et ils en sont revenus… avec un film !
Ce duo franco-belge a piqué ma curiosité avec ce docufiction réalisé par des backpackers, avec un tout petit budget et beaucoup de bonne volonté. Ben et moi avons pu le voir en avant-première sur Vimeo il y a quelques jours.
Working Holiday Visa est un mélange de fiction et de réalité.
- Côté fiction, on suit Steffen, un routard allemand en working holiday qui perd toutes ses affaires et ses économies et doit repartir à zéro dès les premières minutes du film.
- Côté réalité, le film inclut avec beaucoup de fluidité des séquences tournées en caméra cachée et des entrevues qui mettent le doigt là où ça fait mal, en particulier les abus et les arnaques au travail, que la plupart des routards rencontreront en Nouvelle-Zélande (et dans d’autres pays).
Selon leurs propres mots, le but de ce docufiction est d’offrir « un regard équilibré et original sur ce type de voyage. » Notre avis ? C’est réussi ! Au final on a l’impression de suivre une histoire vraie d’un bout à l’autre ; c’est touchant et bien fait.
La bande-annonce :
Un film authentique
Ce que j’ai beaucoup aimé du film, c’est qu’il réussit en seulement 88 minutes à dresser un portrait très juste de ce qu’est l’expérience d’un PVT au niveau personnel. Steffen, le personnage principal, connaît de grosses galères, dès le début du film : eh oui, il n’est pas au paradis !
Puis il fait de belles rencontres, se lance dans des entreprises un peu farfelues, réfléchit beaucoup sur lui-même et sur le monde, en bref : il vit des expériences différentes qu’il n’aurait pas connues s’il était resté en Allemagne.
Mais peu importe la nationalité, qu’on vienne du Royaume-Uni, de France ou du Chili, on a l’impression que cette histoire montre une partie importante de notre histoire, au niveau humain : en quelques mois de WHV Steffen apprend et mûrit, il passe par un tas d’émotions qu’on a nous-même ressenti en PVT.

Tournage sur une plage néo-zélandaise | Photo Miléna Grillon
Un portrait de la Nouvelle-Zélande
Même si certains aspects du docufiction Working Holiday Visa sont similaires quel que soit le pays où l’on fait son PVT, impossible d’oublier que le film raconte une histoire en Nouvelle-Zélande. Il y a la beauté de ses paysages en toile de fond, quelques superbes séquences de nuit, mais surtout, il y a les kiwis.
Steffen rencontre des Maoris qui partagent un peu de leur vision du monde avec lui, un Néozélandais « de cinquième génération » qui lui donnera l’opportunité dont il a bien besoin, un Indien qui veut s’établir définitivement en Nouvelle-Zélande… des personnes qui reflètent bien à quel point la Nouvelle-Zélande est un pays cosmopolite.
Interview des auteurs
Elodie et Antoine ont bien voulu répondre à nos questions sur Working Holiday Visa et sur leur expérience.
Dans le film le sujet du « pourquoi partir » revient plusieurs fois, et Steffen explique notamment qu’il avait peur d’être devenu le spectateur de sa vie bien établie, plutôt que l’acteur. Et vous, pourquoi avez-vous tout plaqué pour partir ?
Parce que nous avons eu peur de voir notre vie nous échapper, tout comme Steffen. Nous savons que derrière le working holiday visa tout le monde n’a pas cette motivation, mais pour certains d’entre nous, c’est l’une des raisons qui nous pousse à bouger.
Alors après quelques années de travail dans notre branche – l’information, la réalisation – nous nous sommes senti bloqué dans une routine. Nous avons décidé de partir pour briser ce cercle. Et pour être sûr de ne pas retomber dans cette situation nous avons démissionné plutôt que de prendre un congé sabbatique, vendu toutes nos affaires et rendu notre appartement. Pas de parachute, seule l’aventure pour horizon, d’une certaine manière quand nous sommes arrivés en Nouvelle-Zélande, nous nous sommes retrouvés à nu, sans objectifs, ni repères. C’était exaltant et déroutant à la fois.
L’un des buts du film est de dénoncer les arnaques au travail pour les jeunes en PVT mais aussi pour d’autres populations de travailleurs (étudiants étrangers, saisonniers venant de nations du Pacifique Sud). Pendant mon PVT en 2011 j’ai connu pas mal d’abus mais ils avaient l’air nettement moins répandus que dans le film : les working hostels (où l’on paye, parfois très cher, pour le logement et le travail… qu’on n’a pas forcément), les employeurs demandant un « bond » (soit payer pour travailler, un comble !)… Est-ce que c’est vraiment devenu la norme ?
Est-ce que c’est devenu la norme ?… Hum ! Je n’irai pas jusqu’à dire ça, d’ailleurs dans le film, Steffen n’a de problème qu’avec son premier travail, les deux suivants se passent sans encombre. Cela dit sans expérience du pays, il est difficile pour un nouvel arrivant de faire la différence entre les arnaques et les bons plans.
Pour faire ce film nous nous sommes renseignés, inspirés de ce que nous avons collectés comme informations durant notre road-trip. Nous avons posé systématiquement des questions à tous les voyageurs que nous avons croisés et une chose est sûre, la majorité ne nous a pas dit que c’était facile de trouver du travail et la majorité nous a parlé des arnaques avec les aubergistes. Nous concernant, avant d’avoir un premier job rémunéré, il a fallu attendre 2 mois et demi et nous avions beaucoup cherché.

Travailler dans les vergers, un classique de PVTiste en Nouvelle-Zélande | Photo Miléna Grillon
Au final, est-ce que vous avez réussi à économiser en Nouvelle-Zélande ?
C’est une excellente question parce qu’elle révèle beaucoup d’enjeux. Et bien non nous n’avons pas réussi à économiser en Nouvelle-Zélande. Au contraire, nous avons dépensé plus : soit toutes nos économies ainsi que l’argent que nous avons gagné sur place.
Ceci dit, notre situation est particulière car notre principal poste de dépense a été le film. On a dû acheter du matériel audio-visuel, payer les logements, la nourriture et les déplacements des 7 personnes de l’équipe pendant un mois et demi. Sans le film on aurait peut-être pu arriver à l’équilibre mais je ne crois pas qu’on serait parti du pays avec plus d’argent qu’au départ.
Nous pouvons quand même souligner que lorsque l’on parle du tourisme comme la 2ème ressource économique du pays, les PVTistes sont intégrés dans ces ressources. Le PVT c’est avant tout fait pour collecter de l’argent pour voyager.
La famille de Steffen n’approuve pas forcément son choix d’aller en working holiday au bout du monde, une difficulté que beaucoup de routards connaissent. Comment ça s’est passé avec vos proches ?
La plupart étaient encourageants, les amis bien sûr mais aussi les parents proches. Ceci dit, il y a toujours quelques récalcitrants. Ce type de choix radical renvoie aussi chacun à ses propres peurs et capacités. Quelques personnes de notre entourage se sont carrément opposées à notre départ.
Après la déception, nous nous sommes servis de cette énergie pour rebondir beaucoup plus loin. C’est dans ces moments là que l’on mûrit et qu’on s’affirme davantage aussi.
Un élément qui nous a étonnés, c’est l’absence totale de scènes dans un backpackers, ces auberges de jeunesse qu’on trouve partout en Nouvelle-Zélande. Pourquoi ce choix ?
Les backpackers et hostels ne sont pas tout à fait absent du film, lorsque Steffen arrive pour décrocher son premier job, ou encore lorsqu’il discute avec Georges des îles Salomon. Ce sont des backpakers que nous avons fréquenté. En revanche, c’est vrai qu’on n’y voit pas d’auberges remplies de jeunes où il se passerait des fêtes à gogo. On a fait le choix de ne pas s’attarder sur cet aspect du voyage tout simplement car c’est un aspect qui ne nous a pas marqués. Nous sommes conscients que c’est une réalité pour beaucoup de jeunes voyageurs, c’est peut-être moins le cas pour ceux qui partent avec déjà une expérience professionnelle et qui sont sans doute plus en recherche de sens que de sensations.
Si on refait un film sur le working holiday visa avec un héros qui sort du lycée, alors on n’y coupera pas 😉

Autre classique, planter la tente là où on peut et admirer le paysage ! | Photo Miléna Grillon
En Nouvelle-Zélande le visa vacances travail est très important, il y a des jeunes en PVT partout et ils jouent un rôle important dans l’économie. Est-ce que vous prévoyez de distribuer le film en Nouvelle-Zélande ?
Nous espérons que le film sera connu en Nouvelle-Zélande car ce film a été en partie fait pour que les arnaques cessent. Ce sont bien les pouvoirs locaux en place qui peuvent intervenir dans ce dossier. Plus du monde le verra, plus la question ne pourra être ignorée. Une prise de conscience peut grandir avec des preuves à l’appui. Nous cherchons des contacts sur place pour faire connaître ce film en Nouvelle-Zélande mais aussi en Australie. Ceux qui ont une idée peuvent nous écrire à fouelofou@yahoo.fr D’avance nous les remercions.
Un projet de voyage et film en mode routard, ou en PVT, à l’horizon ?
Ce film nous donne juste envie de continuer à vivre nos rêves. En fonction de la façon dont le film sera reçu on pourra également envisager un nouveau projet à destination des voyageurs. Il y a aussi un projet de documentaire sur le mur de la Palestine avec des artistes qui se dessine à l’horizon… Quelque chose d’assez différent dans la forme. Et il y aussi l’envie de continuer à explorer et affiner ce genre que nous avons développé avec Working Holiday Visa, la fiction-documentaire.
Après avoir vu Working Holiday Visa, vous aimeriez que les spectateurs en retirent quelle idée, quel enseignement ?
D’oser. Osez partir, osez tenter l’aventure, osez rencontrer l’inconnu et ne pas se laisser influencer par ses peurs. Mais aussi oser ne pas se laisser faire lorsque des situations inconfortables croisent votre chemin, lorsque des personnes amenées à abuser de leur pouvoir ne respecte pas l’équité intrinsèque qui devrait régir les relations humaines. Lorsque par exemple des backpackers ou des employeurs essaient de vous exploiter, osez réagir sinon les problèmes ne disparaîtront pas tout seul. Osez exister tout simplement.
Dernière question, il y a eu un grand absent dans votre film : mais où sont les moutons ?! 😉
Rires – On n’en voit pas parce que nous n’en avons pas vu sur l’itinéraire du film, cela dit on s’attendait aussi à en voir énormément, que les collines soient blanche de moutons et finalement c’est pas toujours comme ça. Il y a beaucoup de place pour les pâturages, du coup même si il y beaucoup de moutons dans l’absolu, ça reste pas beaucoup de moutons au mètre carré.
Plus sérieusement, est-ce que vous aimeriez ajouter quelque chose ?
Nous espérons que ce film rappellera de bons souvenirs à tous ceux qui ont pratiqué le permis vacances travail, qu’ils se reconnaîtront en partie et que cela donnera envie à tous de tenter l’aventure car bien que des problèmes soient soulignés dans Working Holiday Visa, nous avons avant tout des souvenirs inoubliables en tête et des émotions uniques à partager de ce road-trip devenu un road-movie. Bonne aventure à tous !

Tournage au supermarché | Photo Miléna Grillon
Voir le docufictionWorking Holiday Visa
Le film sort le 1er novembre en ligne, vous pouvez le visionner en streaming (via Vimeo) pour 2€ à partir du site internet du film Working Holiday Visa . Il est disponible en VOST français, allemand et anglais. Une sortie en DVD est aussi prévue, pour plus d’informations rendez-vous sur le site.
Ne le ratez pas, c’est un film qui vaut absolument le coup. Il réveillera une tonne de souvenirs chez ceux qui sont déjà partis en WHV et donnera une vision intéressante à ceux qui y songent… ou dont un proche a tenté l’aventure.
Mots-clefs : film WHV Nouvelle-Zélande
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