On rencontre toutes sortes de personnages en voyage, certains plus fréquentables que d’autres. Hier, j’ai fait la connaissance de David (dont j’ai changé le nom), un belge qui pratique le « French shopping », phénomène de plus en plus courant en Australie. Selon lui, il le fait par nécessité.
Le French shopping est pratiqué par de nombreux routards, ça désigne le vol à l’étalage, dans les supermarchés et magasins. Beaucoup de ces voleurs disent qu’ils ne volent que des produits de première nécessité, car ils ont besoin de manger, mais certains poussent même jusqu’à voler de tout, vêtement, gourmandises, etc. Le terme French shopping, je l’avais déjà entendu en 2010 quand je vivais à Carnarvon, en Western Australia, l’État où l’expression est née. Pourquoi « french » ? Parce que ce sont des routards français qui ont commencé à voler à l’étalage dans des proportions impressionnantes, mais ce phénomène n’a généralement pas de nationalité.
David est belge francophone. Il explique son attitude par le besoin de s’alimenter, mais il vole bien plus que du riz ou un peu de pain, il se fait plaisir et cuisine de bons petits plats… A mes yeux, lui et tous les autres sont juste des voleurs opportunistes : la sécurité est minimale dans les supermarchés et commerces ici, d’ailleurs les Australiens sont plus confiants et plus honnêtes que les Européens en général.
Le pire, c’est qu’un bon nombre d’entre eux ne travaille pas : ils disent que les Australiens les exploitent et d’ailleurs c’est aussi comme ça qu’ils se justifient ! Les travaux agricoles sont difficiles, c’est vrai. Il est aussi vrai que la plupart des backpackers passent par eux, car ce sont des boulots faciles à obtenir, qu’ils embauchent énormément et qu’il faut travailler dans ce milieu pour étendre son séjour d’une année supplémentaire avec le WHV. Les Australiens ne travaillent généralement pas dans les fermes du pays, s’ils le font c’est parce qu’ils sont propriétaires ou par choix, car ils ont évidemment plus d’options. Au contraire, beaucoup d’européens ne peuvent pas travailler dans d’autres domaines parce qu’ils ne parlent pas anglais. Pour obtenir un visa vacances-travail, il leur suffit d’aller sur internet, de remplir un formulaire et de payer par carte bancaire. Ce n’est pas comme pour les sud-américains ayant accès au WHV, qui doivent avoir un niveau fonctionnel d’anglais pour voyager en Australie. Du coup, beaucoup ne parlent pas anglais en Australie, ils se regroupent par nationalité et « s’isolent » ainsi, mais ils sont frustrés parce qu’ils ne peuvent pas postuler pour grand nombre d’emplois et ont des jobs souvent éprouvant, en particulier dans le secteur agricole : pas besoin de parler anglais pour cueillir des pommes.
On retrouve ce schéma dans les autres pays avec le visa vacances-travail. Par exemple en Nouvelle-Zélande, j’ai connu exactement le même phénomène avec des Argentins et des Chiliens cette fois, qui de la même façon se regroupaient et ne parlaient pas du tout anglais ou pas du moins pas suffisamment pour avoir une conversation sans problèmes. En Nouvelle-Zélande ils n’ont pas besoin de parler anglais pour obtenir le visa. Quand j’étais là-bas, j’ai vu beaucoup d’Argentins et Chiliens pratiquer le « French shopping » dans les supermarchés kiwis.
Ici, le problème de ces voyageurs mal préparés a pris d’autres proportions : début mai, le consul de France en Australie, Eric Berti, a écrit une lettre ouverte aux 22 000 jeunes français en working holiday où il déplore le comportement de ses compatriotes, comme leur consommation excessive d’alcool et leur manque de respect pour la police et les autorités australiennes, ce qui fait beaucoup de mal à la réputation des Français en Australie. L’élément déclencheur pour Eric Berti a été la dégradation par un jeune français ivre du monument de l’ANZAC (Australian and New Zealand Army Corps) sur la Martin Place à Sydney mais le problème va bien au-delà. Tous les Français ne sont pas comme ça bien sûr, Anne est française et elle et beaucoup de ses compatriotes ne se comportent pas ainsi, mais pour que le consul décide de s’exprimer il faut que la situation soit très mauvaise.
Alors David a des économies sur son compte pour se payer des vacances en Thaïlande après l’Australie, mais il n’y touche pas et il pense que cela lui donne le droit de voler, puis en plus les méchants Australiens ne veulent pas l’embaucher et s’ils le font, le travail est dur. Tout au long de mes années de voyage, j’ai souvent eu peu ou pas d’argent, au point que si j’essaie de me rappeler combien de fois j’ai été à zéro, je ne peux pas, j’ai perdu le compte ! Par exemple, quand je suis arrivé en Australie en 2010, j’avais 120 $ en tout et pour tout. Je suis quand-même allé de l’avant et j’ai trouvé du travail au noir dans une ferme. J’ai travaillé dur pendant quelques mois et économisé suffisamment pour continuer à voyager. Quand je suis arrivé en Nouvelle-Zélande je ne parlais pas un mot d’anglais. Je me suis séparé de mon groupe d’amis après deux semaines, sachant que si je restais avec eux je ne progresserais jamais : c’est l’une des meilleures décisions que j’ai prises depuis que j’ai commencé à voyager.
Des gens comme David, qui cherchent à légitimer le vol se référant à une nécessité fictive, sont la pire chose qui puisse arriver aux routards. A cause de gens comme lui qui s’attendent à ce que tout leur tombe dans le bec sans faire d’efforts, la réputation de tous est en jeu.
10 commentaires
Souvenirs souvenirs….!! J’ai découvert ce concept du « french shopping » un peu tardivement dans mon voyage mais j’ai très vite pu vérifier que c’est une vraie mauvaise réputation pour les frenchies qui vivent en OZ…
En effet : il paraît même que pas mal d’employeurs n’embauchent plus de français à cause de leur réputation de voleurs et d’irrespectueux… et de problèmes qu’ils ont eu avec quelques uns de nos compatriotes !
C’était le coup de gueule d’Anne !!!
Et tu as bien raison, il y a des comportements qui sont intolérables, et se cacher derrière des excuses bidons ne justifient rien !
En tous cas, moi qui ne connaissait pas ce phénomène, je pense qu’on devrait commencer par en changer le nom : « french shopping », je te rebaptise « belgian shopping » !!!
😉
Oui bon, je viens de me rendre compte qu’il ne s’agissait pas du coup de gueule d’Anne mais de Ben !!!
Hihi !!!
Franchement ce genre de comportement m’écoeure… Tout le monde sait très bien que l’Australie représente un gros budget et le cout de la vie en sois ne justifiera jamais le vol à l’étalage (et encore moins si tu as de quoi voyager en Thailande après…). En plus, même si c’est difficile, les possibilités de travailler en Australie sont nombreuses… Menfin, on passera surement par l’Australie dans quelques mois, j’espère que la réputation des francophones ne va pas empirer d’ici là. Car même si on est Suisse, avec l’accent que j’ai quand je parle anglais, ça fait aucune différence 😉
Benoit(novomonde) Artículo reciente – Article récent Marita, recontre avec une voyageuse hors du commun
Dire que certains de ces voleurs se justifient en disant que c’est pour eux une nécessité… Quelle malhonnêteté intellectuelle ! Je suis sûr que la plupart ont un billet retour dans leur poche ou quelques sous de côté pour pouvoir rentrer « au cas où ».
J’ai déjà vu un écriteau à Londres indiquant « interdit aux chiens et aux français » devant un magasin de souvenirs.
En Amérique latine, ce sont les argentins qui ont parfois mauvaise réputation, mais ils ne volent pas forcément, c’est plutôt de la mendicité sur les marchés et de la vente d’artisanat pour financer leur voyage (mais encore une fois, c’est une réputation, c’est loin d’être le cas de tous les mochileros !).
Seb Artículo reciente – Article récent 10 règles indispensables pour survivre en Argentine
Je vois que mon compagnon de voyage m’a devancé sur les commentaires. Je ne connaissais pas du tout cette pratique, déjà que la réputation des français est affreuse (on a même songé à créer une association pour réhabiliter l’image des français c’est pour dire ! mais y’avait trop de boulot). Ce qui me dégoûte le plus là dedans c’est que ces gens qui se disent précaires, l’on d’une certaine manière choisit. Rien ne les a obligé à aller en Australie (car déjà pour y arriver c’est qu’on a un minimum de pécule). Je trouve ça obscène de se revendiquer précaire, d’être soit disant exploité alors que d’autres sont dans des situations réellement difficiles, voire de pauvreté et non pas ou très peu de possibilités de s’en sortir. Je pense à tous ces migrants que je vois par exemple tous les jours en bas de chez moi faire la queue devant une association d’aide juridique et qui galèrent vraiment et qui n’ont pas eu le choix de venir en France. Faudrait que ces routards aient un minimum de décence quand même (égocentrisme quand tu nous tiens). ça me fait penser aussi à ceux qu’on a croisé sur les routes et qui avaient pour seul objectif de voyager le moins cher possible (si possible sur le dos des autres) et qui trouvaient tout trop cher (s’en offusquait même) et avaient toujours le sentiment de se faire arnaquer. En attendant ils négociaient tellement les prix qu’ils ne se rendaient même pas compte que ce qu’ils payaient n’étaient vraiment pas équitable et qu’ils profitaient du besoin immédiat d’argent des marchands pour avoir ce qu’ils souhaitaient. Les exploités sont en fait parfois les exploiteurs.
Bonjour Laura, c’est vrai qu’il n’y a rien de plus agaçant que de voir ce genre de comportement. Je crois que ça peut nous arriver à tous d’avoir des moments où on ne se rend pas compte qu’on est bien lotis mais là c’est indécent. Dans le cas des backpackers en Australie ce décalage de difficultés (même si je ne mettrai jamais ça au niveau des immigrés qui galèrent sous tes fenêtres) joue beaucoup dans notre énervement : pour Ben avec son passeport Chilien le WHV est nettement plus compliqué à obtenir et ça le met en boule de voir d’autres pour qui c’est si facile et qui se comportent aussi mal. Maintenant pour nous ce phénomène n’a pas de nationalité, simplement il y a énormément de Français donc forcément des gens associent les Français au phénomène. Pour l’anecdote, le pire que j’ai vu, c’était une Canadienne (plusieurs milliers de dollars volés dans la caisse du camping où elle était réceptionniste) alors… Merci pour la participation
Nous avons aussi constaté avec déception ce comportement ridicule… Dans ces 2 sublimes pays que sont l’Australie et la Nouvelle Zélande, la confiance et l’honnêteté sont souvent mises au premier plan : honesty box sur les camps des parcs nationaux, fruits et légumes à vendre sur les bords de route en échange d’une petite pièce, ainsi que des marchandises en dehors des caisses de supermarché… et le tout sans « contrôle ». C’est là qu’arrive le backpacker, issu d’un pays bondé d’interdictions, qui, sous prétexte qu’il n’est pas surveillé et que c’est facile, se permet de voler ! J’en ai même entendu dire : « non mais en France je ne le ferais pas ». Le pire dans tout ça c’est que ces adeptes du « french shopping » ont aussi bien souvent acheté un van dans lequel il mettent de l’essence pour le faire avancer… Et ils se plaignent d’être fauchés, pourtant ils ont toujours de quoi picoler. J’associe ce comportement à celui des free campers qui se permettent de polluer visuellement certains espaces avec leurs poubelles et leurs affaires déballées. On aime trop ces pays et on a vu une grosse différence entre 2010 et 2013 en Australie, un jour il n’y aura plus d’aires gratuites (proches des villes) à cause de tout ça… C’est vraiment cool d’avoir cette opportunité de WHV et je souhaite à tout le monde de se lancer dans l’aventure mais peut être que des quotas auraient permis d’éviter une telle invasion et mise à l’épreuve de notre « réputation » !
Claire Artículo reciente – Article récent L’Australie au cœur rouge
Bonjour Claire, je retrouve beaucoup de nos constats dans ton commentaire, y compris le rageant « mais jamais je ne ferais ça dans mon pays »… Des quotas pourquoi pas, moi je me dis que justifier d’un niveau minimum d’anglais (des bases simples, je conçois qu’on aille dans ces pays pour s’améliorer !) pour obtenir le visa pourrait aider aussi : Déjà à faire le tri des vraiment motivés qui prépareront et passeront un examen comme le TOEFL, ensuite pour s’assurer qu’ils seront capables de se débrouiller une fois là-bas. Ce n’est pas la seule raison mais j’ai parfois eu l’impression que pour ces backpackers voleurs la barrière de la langue jouait dans leur délire ridicule et ils ne faisaient rien pour s’améliorer en anglais. C’est l’une des exigences pour les pays sud américains qui ont le visa avec l’Australie et plus j’y pense plus ça me parait intéressant.